• La discrimination des femmes afro-américaines au travail

    En 2006, les femmes noires qui constituaient 7% de la population en âge de travailler, représentaient 14% des femmes au travail et 53% des travailleurs noirs, toutefois, elles sont largement invisibles des politiques sur la race et le genre.

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  • L'esclavage en France (7) : Les données du recensement

    ¤ L'étude du recensement des Noirs auprès du clerc de l'Amirauté....

    - La Race - Dans le système colonial français, on utilise des termes raciaux pour distinguer les individus ayant une proportion de sang blanc (nègre, mulâtre, quarteron). [Le terme "métis" fait référence à des personnes dont les ancêtres n'étaient ni européens ni africains, mais qui avaient du sang amérindien.] Toutefois, au 18e siècle, en métropole, on utilise l'expression "gens de couleur" pour englober tout le monde.

    - La zone géographique - 50% des Noirs en France, venus s'enregistrer auprès du clerc de l'Amirauté viennent de Saint-Domingue ; tandis que 25% viennent de l'Océan Indien (Ile Maurice, La Réunion, Madagascar, le Mozambique, l'Inde). 15% viennent directement d'Afrique de l'Ouest, 10% viennent d'Amérique du Nord. Il apparaît que les "Noirs créoles", c'est-à-dire ceux venant des colonies caribéennes, avaient plus de chance d'être employés comme domestiques, du fait de leur familiarité avec la langue et les coutumes françaises.

    - L'âge - Des Noirs recensés, dont on connaît l'âge approximatif, 58% ont entre 11 et 30 ans, avec une proportion de trois hommes pour une femme. Dans le pourcentage restant des Noirs entre 30 et 50 ans, le nombre de femmes égale ou dépasse celui des hommes. Peut-être est-ce dû au fait qu'elles sont les maîtresses des colons qui les faisaient recenser.

    - Le sexe- Sur les 159 Noirs enregistrés, seuls 49 sont des femmes, mais cette proportion correspond à celle des esclaves aux Caraïbes françaises (un tiers de femmes).

    - Le statut : esclave ou affranchis : alors qu'en Amérique, l'affranchissement concerne surtout les femmes et leurs enfants, en France, au 18e siècle, ni le sexe ni la race ne détermine l'affranchissement, mais plutôt l'âge. Ainsi, l'âge de la majorité en France (30 ans pour les hommes) est l'âge moyen des esclaves affranchis. D'autre part, l'une des anciennes formes d'affranchissement, dans la tradition coloniale, est le baptême, même si celui-ci n'a aucune force légale (le Code Noir, dans son article 2, précisant que tous les esclaves dans les îles devaient être baptisés dans la religion catholique).

    - L'illétrisme : sur les 21 noirs qui se sont présentés d'eux-mêmes pour se faire recenser, 7 ont signé de leur nom, laissant supposer qu'ils savaient lire et écrire. Parmi eux, un était tailleur, deux étaient maîtres d'escrime, un était domestique. Une étude menée à Bordeaux, entre 1740 et 1787, montre que les Noirs sachant lire et écrire étaient majoritairement des hommes d'une vingtaine d'années ou des adolescents. De plus, sur les 85 "sujets" de l'études, 80 étaient mulâtres, ce qui laisse supposer que ceux-ci étaient peut-être des enfants de colons et de femmes noires venues en métropole pour recevoir une éducation. Par comparaison, le faible échantillon d'études à Paris (les registres de l'amirauté, avec les 7 Noirs ayant signé de leur nom) laisse à penser que les Noirs instruits, dans la capitale, étaient surtout des travailleurs affranchis.

    - La raison du séjour en France et le travail : pour beaucoup de Noirs affranchis, respecter la loi de 1762 en se faisant recenser était une façon pour eux de rendre officiel leur statut d'Homme libre. Les raisons du séjour en France les plus souvent invoquées, avant et après 1762, étaient l'instruction religieuse et l'apprentissage à un métier (surtout parce que c'étaient les seules autorisées avant 1762). Il est à noter qu'une instruction religieuse pouvait néanmoins être donnée dans les colonies, étant donné que de nombreux Noirs en France avaient été baptisés là-bas. Ainsi, recevoir une instruction religieuse n'était souvent pas la véritable raison, et cachait plutôt le fait que les colons amenaient avec eux leurs esclaves comme domestiques. Recevoir une éducation était une raison rarement donnée. Enfin, la majorité des esclaves recensés qui invoquaient l'apprentissage à un métier ne spécifiaient pas le métier en question, ni le nom du maître d'apprentissage, comme cela était requis. Ce qui laisse supposer, encore une fois, que la raison de leur venue était en réalité de servir de domestique à leur maître colon. ---> Dans le registre de 1762, les femmes de chambre noires sont comptabilisées au nombre de 7, de 18 ans à 46 ans (moyenne d'âge : 29 ans et demi). Les valets sont au nombre de 2, avec une moyenne d'âge de 25 ans. Les fabricants de perruques sont 13, de 8 ans à 31 ans (moyenne d'âge : 17 ans), 8 cuisiniers (7 hommes, 1 femme) sont enregistrés, de 14 à 42 ans (moyenne d'âge : 25 ans), etc. Encore une fois, les métiers évoqués ont peu d'utilité dans les colonies, contrairement à ce que préconise la loi de 1762. Ce constat conforte l'idée que la majorité des esclaves étaient en France pour servir leur maître plutôt que de passage, avant de retourner aux Antilles, avec un nouveau métier.

    - Leur adresse : d'après le registre, la plus grande concentration de noirs se trouvaient à Saint-Eustache, près des Halles ; et à Saint-Roch, près du Palais Royal, dans les quartiers les plus riches donc.

    Source : "There are no slaves in France", de Sue Peabody.

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  • ¤ Le danger des relations interraciales, selon Poncet de la Grave...

    - En 1762, le procureur du Roi, Poncet de la Grave, estime que les Edits de 1738 et de 1776 sont inutiles car inappliqués : le nombre de Noirs dans la capitale s'accroît banalement en dépit du risque de "défiguration" de la nation (relations sexuelles interraciales, caractère dangereux des Noirs, libres ou pas).

    - En 1777, il saisit l'opportunité de la « Police des Noirs » pour régler en partie le problème des liaisons interraciales qu'il avait soulevé précédemment, et en particulier concernant les prostituées noires. Cependant, Poncet de la Grave devait obtenir une permission spécifique et individuelle pour chaque Noir qu'il voulait arrêter, et que seul le lieutenant général de police à Paris distribuait. Toutefois, du fait de son insistance, les autorités compétentes acceptèrent finalement que des Noirs puissent être arrêtés à sa demande, à condition néanmoins que ceux-ci soient immédiatement conduits à la prison du Châtelet, où il devait alors obtenir une permission pour les interroger. Le procureur du Roi défendait notamment sa position en arguant qu'en expulsant les Noirs aux colonies, on protégeait ainsi la jeunesse des maladies vénériennes qu'ils transmettaient, puisqu'on en supprimait la cause ; idem pour les mariages interraciaux. Poncet de la Grave associait en effet les Noirs aux maladies vénériennes, et la quarantaine qu'il prônait ressemblait plus à une métaphore de la quarantaine de la nation blanche contre la contamination par les Noirs.

    ¤ L'échec des plans de De la Grave...

    - Poncet de la Grave avait arrêté deux prostituées noires, dont il avait ordonné l'expulsion vers les colonies, après les avoir interrogées. Toutefois, Chardon contrevint aux ordres de De la Grave en ordonnant la libération des deux femmes, qui n'avaient été coupables que de "libertinage", et rejeta les requêtes de De la Grave pour arrêter et interroger toutes les prostituées noires et les vagabonds. De plus, pour anticiper toute future demande de Poncet De la Grave, Chardon disposa que l'autorité de ce dernier, dans le cadre de la Police des Noirs, était limitée à l'arrestation des Noirs arrivés en France depuis la date de la publication de la loi.

    Source : "There are no slaves in France", de Sue Peabody.

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  • L'esclavage en France (5) : la Police des Noirs

    Les lettres patentes 3 septembre 1776 sont, pour la première fois, anti-Noirs, et suspendent toute action en justice pour s'affranchir.

    La proposition de loi du 8 septembre 1776 vise "l'extinction" (pas "l'extermination") de la race des nègres du royaume, par l'interdiction de la venue de nouveaux Noirs et la difficulté accrue de pouvoir se marier entre Noirs en France.

    L’ordonnance du 16 avril 1777 enjoint aux maîtres d'enregistrer leurs (domestiques) noirs, sous peine d'amende.

    La "Déclaration pour la Police des Noirs" est promulguée le 9 août 1777, pour freiner l'arrivée des Noirs dans la capitale. Elle instaure dans chaque port français un lieu de détention pour les esclaves dont les maîtres sont de passage en France. C'est la première législation royale basée sur la couleur de la peau.

    Une fois la Police des Noirs en application, la Cour de l'Amirauté a pour instruction de ne plus instruire de demandes pour être libre.

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  • L'esclavage en France (4) : les demandes en justice pour la liberté

    ¤ En 1738, lors du procès Jean Boucaux [esclave] contre Verdelin [maître], les défenseurs du principe du Sol Libre font valoir le droit coutumier français en matière d'affranchissement. Les exemples coutumiers qu'ils prennent pour appuyer leur thèse de l'existence de ce principe sont subordonnées à des conditions préalables (= que le maître soit français et catholique, que l'esclave soit baptisé, que le maître donne son consentement, qu'il s'agisse de "villes libres", comme Toulouse, Bordeaux, etc.) Les défenseurs parviennent à le présenter comme un principe général, subordonné à une seule condition (= poser le pied sur le sol français) et applicable de plein droit.

    Lors des débats du procès, peu d'allusions sont faites à la race de l'esclave, et reposent surtout sur la condition de l'esclave.

    Finalement, Jean Boucaux gagne le procès et est libéré. Malheureusement, Verdelin interjette appel directement auprès du Roi et obtient gain de cause. En échange de sa liberté, Boucaux ne touchera pas les dommages et intérêts qui lui avaient été alloués et ne pourra plus revenir à Paris ni retourner dans une colonie des Antilles (peut-être par peur d'une menace de désordre ou de révolte). Malheureusement, comme pour Boucaux, l'administration royale interviendra par la suite pour ordonner l'arrestation et la reconduction aux colonies de tous les esclaves libérés après avoir pétitionné pour leur liberté.

    Peu de temps après le procès Boucaux contre Verdelin, en réaction, la Déclaration de 1738, qui durcit la législation, est publiée.

    ¤ En 1759, l'arrêt Francisque de Pondichéry [esclave] contre sieur Brignon [maître], qui reconnaît la liberté de l'esclave, crée un précédent pour les futures plaintes pour la liberté (arrêt de principe). Il entraîne une série d'actions en justice, dans les années 1760 à 1770, résultant toujours en la libération de l'esclave.

    Dans cette affaire, la défense argue que l'Edit de 1716 et la Déclaration de 1738 ne s'appliquent qu'aux esclaves noirs ("nègres"). Or, Francisque est noir Indien. Les avocats exposent donc les différences entre les nègres et les Indiens.

    Dans la définition de "nègre" des dictionnaires du 18e siècle, soit le terme est associé à "noir africain", soità "esclave noir". La définition reprise dans l'Encyclopédie, elle, associe directement "nègre" à "esclave". Seul le dictionnaire de l'Abbé Prévost, "Manuel Lexique", distingueles deux sens (= personne de peau noire, mais désignant généralement les esclaves noirs).

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